Le syndrome du personnage parfait
L’un des pièges les plus courants dans l’écriture de scénario est la création de personnages trop parfaits ou unidimensionnels. Les protagonistes sans défauts et les antagonistes purement maléfiques manquent de profondeur et de crédibilité. Les spectateurs ont du mal à s’identifier à des personnages qui ne ressemblent en rien à de vraies personnes.
Pour éviter ce piège, il est crucial de doter vos personnages de qualités et de défauts. Même votre héros devrait avoir des faiblesses, des peurs ou des travers qui le rendent humain. De même, votre antagoniste gagnera en complexité s’il possède quelques traits positifs ou une motivation compréhensible. Cette approche nuancée crée des personnages plus riches et intéressants.
Comme le souligne le célèbre scénariste Robert McKee :
« Un personnage n’est pas ce qu’il dit. Un personnage est ce qu’il fait. »
L’absence de conflits
Un autre piège majeur est l’absence de véritables conflits dans votre scénario. Sans conflits, votre histoire risque d’être ennuyeuse et sans enjeux. Les conflits sont le moteur de toute narration captivante, qu’ils soient internes (les dilemmes moraux du personnage) ou externes (les obstacles qu’il doit surmonter).
Pour insuffler du dynamisme à votre scénario, veillez à introduire des conflits à différents niveaux. Confrontez vos personnages à des choix difficiles, créez des obstacles sur leur chemin, et mettez en scène des antagonistes qui s’opposent activement à leurs objectifs. Les conflits génèrent de la tension et maintiennent l’intérêt du public.
Le réalisateur Alfred Hitchcock résumait parfaitement l’importance du conflit :
« Le drame, c’est la vie dont on a enlevé les moments ennuyeux. »
La surexposition
La surexposition est un piège dans lequel tombent de nombreux scénaristes débutants. Il s’agit de la tendance à trop expliquer l’histoire, les personnages ou le contexte, souvent par le biais de longs dialogues explicatifs ou de narrations en voix off. Cette approche sous-estime l’intelligence du public et nuit au rythme du film.
Pour éviter ce problème, adoptez le principe « Show, don’t tell » (montrer plutôt que dire). Privilégiez les actions et les images pour révéler les informations importantes. Laissez le public déduire certains éléments par lui-même, ce qui le rendra plus actif et engagé dans l’histoire. N’oubliez pas que le cinéma est avant tout un médium visuel.
Le scénariste Aaron Sorkin offre ce conseil pertinent :
« Dialogue is not just what people say. It’s a weapon they use to get what they want. »
La structure narrative prévisible
Bien que la structure en trois actes soit un outil précieux, son utilisation trop rigide peut conduire à des scénarios prévisibles et formulaires. Les spectateurs modernes, habitués aux conventions narratives, peuvent rapidement deviner la suite de l’histoire si elle suit un schéma trop classique.
Pour surprendre votre public, osez jouer avec la structure narrative. Expérimentez avec des flashbacks, des lignes temporelles non linéaires ou des points de vue multiples. Introduisez des rebondissements inattendus qui défient les attentes du spectateur. L’objectif est de maintenir le public en haleine tout en restant cohérent avec l’histoire que vous racontez.
Le réalisateur Christopher Nolan, connu pour ses structures narratives complexes, déclare :
« I’m very interested in the idea of a film surprising an audience, taking them somewhere they’re not expecting to go. »
Le manque de recherche
Un manque de recherche approfondie peut sérieusement nuire à la crédibilité de votre scénario, surtout si votre histoire traite de sujets spécifiques ou techniques. Les erreurs factuelles ou les représentations inexactes peuvent rapidement briser l’immersion du spectateur.
Pour éviter ce piège, consacrez du temps à une recherche minutieuse sur les thèmes, les métiers, les lieux ou les périodes historiques abordés dans votre scénario. Consultez des experts si nécessaire. Cette attention aux détails enrichira votre histoire et lui conférera une authenticité qui séduira le public et les critiques.
Le scénariste et réalisateur Oliver Stone souligne l’importance de la recherche :
« Research is key. You have to know what you’re talking about to write with authority. »
Conseils pour une recherche efficace :
- Consultez des ouvrages spécialisés et des articles académiques
- Interviewez des experts du domaine
- Visitez les lieux pertinents pour votre histoire si possible
- Explorez les archives et les documents historiques pour les films d’époque
Les dialogues artificiels
Des dialogues peu naturels ou trop explicatifs peuvent rapidement décrédibiliser votre scénario. Les personnages qui parlent de manière artificielle ou qui exposent des informations qu’ils connaissent déjà uniquement pour le bénéfice du spectateur brisent l’illusion cinématographique.
Pour créer des dialogues convaincants, écoutez attentivement comment les gens parlent réellement. Observez les conversations dans différents contextes sociaux. N’hésitez pas à lire vos dialogues à haute voix pour vérifier leur fluidité. Chaque personnage devrait avoir sa propre voix distinctive, reflétant sa personnalité et son origine.
Le scénariste Quentin Tarantino, réputé pour ses dialogues percutants, affirme :
« I steal from every single movie ever made. »
L’absence d’évolution des personnages
Un autre piège courant est de créer des personnages statiques qui ne changent pas au cours de l’histoire. Les meilleurs scénarios montrent une évolution significative des personnages principaux, que ce soit dans leurs croyances, leurs attitudes ou leurs relations.
Pour éviter ce problème, planifiez soigneusement l’arc de transformation de vos personnages. Réfléchissez à la façon dont les événements de l’histoire les affectent et les changent. Montrez comment leurs expériences les façonnent et influencent leurs décisions. Cette évolution rend les personnages plus crédibles et permet au public de s’investir émotionnellement dans leur parcours.
Le scénariste et réalisateur Paul Schrader observe :
« Character is revealed in conflict. The greater the conflict, the more the character is revealed. »
La négligence du rythme
Un rythme mal maîtrisé peut rapidement perdre l’attention du spectateur. Que ce soit un début trop lent qui peine à démarrer ou un enchaînement frénétique d’événements sans pause, un mauvais rythme nuit à l’expérience cinématographique.
Pour maintenir un rythme captivant, alternez entre moments d’action intense et scènes plus calmes. Utilisez ces dernières pour développer les personnages ou installer l’atmosphère. Veillez à ce que chaque scène fasse avancer l’histoire ou révèle quelque chose d’important sur les personnages. N’hésitez pas à couper les scènes superflues qui ralentissent le récit.
Le réalisateur Martin Scorsese souligne l’importance du rythme :
« Cinema is a matter of what’s in the frame and what’s out. »
L’excès de clichés
Les clichés et les stéréotypes sont des pièges faciles dans lesquels peuvent tomber les scénaristes. Bien que certains tropes puissent être utiles pour établir rapidement un contexte, leur utilisation excessive rend le scénario prévisible et peu original.
Pour éviter ce problème, remettez en question chaque élément de votre histoire. Demandez-vous si vous pouvez aborder les situations ou les personnages d’une manière nouvelle et inattendue. Subvertissez les attentes du public en prenant les clichés et en les retournant de manière créative. Cette approche peut apporter fraîcheur et originalité à votre scénario.
Le scénariste Charlie Kaufman, connu pour ses scénarios originaux, déclare :
« Do not simplify. Do not worry about failure. Failure is your friend. »
La négligence du sous-texte
Un scénario qui néglige le sous-texte risque de manquer de profondeur et de subtilité. Le sous-texte, c’est ce qui n’est pas dit explicitement mais qui est implicite dans les actions, les dialogues et les situations. Il ajoute une couche de complexité et d’interprétation à votre histoire.
Pour intégrer efficacement le sous-texte, pensez à ce que vos personnages ne disent pas. Utilisez le langage corporel, les silences et les actions pour communiquer des émotions ou des intentions non verbalisées. Le sous-texte permet de créer des scènes riches en tension et en ambiguïté, offrant au public la possibilité d’interpréter et de s’engager plus profondément dans l’histoire.
Le réalisateur David Lynch, maître du sous-texte cinématographique, affirme :
« The more unknowable the mystery, the more beautiful it is. »